Flore

La situation du Genévrier thurifère dans l’Aurès

Cette démonstration de paysage de l’Algérie, montre l’état critique que les forêts de pays ont atteint, l’état des formations à thurifère en est ; malheureusement, un des exemples les plus expressifs et les plus regrettables.

Aire de répartition naturelle

Le Genévrier thurifère (Juniperus thurifera) espèce strictement méditerranéo-montagnarde occidentale, présent au Maroc, en Espagne, en France (Pyrénées, Alpes, Corse), dans les Alpes italiennes, et en Algérie.

En Algérie, le thurifère existe uniquement dans l’Aurès, Connu sous les noms de Genévrier thurifère ou porte-encens, Aywal ou Hazanzena, noms locaux dans la région, ou encore par l’ancienne désignation, celle de « yammas nt mourth » ; qui signifiée la mère de la terre, un terme qui explique l’intime relation entre l’espèce et l’homme et l’ancienne présence de l’essence dans la région. Malheureusement cette relation est marquée par une histoire d’utilisations abusives ayant laissé sur place des formations dégradé et très clairs.

Photo 1 : formation a thurifère très dégradé dans la région de Photo 3.a : troupeau de brebis et de chèvres près de thurifère (la région de Hkoukth).(Aurès).
Photo 1 : formation a thurifère très dégradé dans la région de Hkoukth.

Dans l’Aurès, l’aire de répartition de thurifère est disjointe à surface restreinte, il se distribue sous forme de formations claires à arbres très épars et souvent de grandes tailles. Probablement, il s’agit du reste d’anciens peuplements plus étendus.

Les formations concerné sont, celles de la région de Hizi n l’abadh avec 8000 pieds environ ,de la région de Hkoukth (Tkout) avec 4000 pieds environs, de la région de Hibhirine et ich  m Oul avec peu d’arbre très épart constituant des formations très clairs en mélange avec le chêne vert (Oukhlif en berbère)  et le frêne épineux (Houzalt).

Citons encore certains localités à thurifère isolés où il est dominé par d’autre espèces forestières mentionnons le cèdre de l’Atlas (Idhyal), le pin d’Alep (Haydha) et le chêne vert : celle de S’gag, celle de Chélia et Hafrant, Village de Ich m Oul, et la Zone d’Inoughissen et Zalatou.

(Les chiffres et les noms des localités utilisés sont issus de l’étude menée par Omar Temagoult en 1988).

Structure et composition des formations

Pour décrire la structure et l’état de thurifère dans la région, on va utiliser les observations effectuées sur terrains, dans la région de Hkoukth et qui peuvent être extrapolés sur l’ensemble de l’aire de répartition de l’essence dans l’Aurès (à cause de la similarité des formations :

La densité des arbres, est très faible et il est parfois difficile par rapport au cas étudié et de l’Aurès en générale d’en parler de véritable peuplement stricto sensu. À propos de la forme des arbres, on a identifié 3 catégories essentielles de formes, dont :

  • La forme buissonnante ; la forme des arbres à l’état juvénile, où la dominance est aux bourgeons latéraux par rapport au bourgeon apical. La présence de cette forme est insignifiante due à l’absence quasi totale des sujets jeunes de thurifère dans la région.
  • La forme arborescente ; la forme la plus répondue dans la région et dans tout l’Aurès, les arbres sont généralement gros avec un tronc court et une cime arrondie montrant la forme d’un champignon (cette forme est issue probablement de la mutilation répétée par les riverains et de leurs troupeaux).
  • La forme étalée ; rare dans la région, c’est la forme ou l’arbre est protégé montrant un houppier plus ou moins conique vers le sommet qu’il s’étale vers le bas au ras du sol. Cependant on trouve deux pieds portant des haillons dans la région de Hkoukth dont, l’un est considérer comme porte-bonheur dont l’autre constitue un lieu de « pèlerinage ».
    Photo 2 : arbre vénéré avec des haillons dans la région de Hkoukth.   
    Photo 2 : arbre vénéré avec des haillons dans la région de Hkoukth.

Gustave Mercier (1897) dit à ce propos “le thurifère constituait et constitue un objet de vénération pour les indigènes, qui, par une coutume superstitieuse, y suspendent des haillons de toutes couleurs” (Photo 2).

Photo 3.a : troupeau de brebis et de chèvres près de thurifère (la région de Hkoukth).
Photo 3.a : troupeau de brebis et de chèvres près de thurifère (la région de Hkoukth).

Les formes mentionnées, montre pour l’ensemble de la surface de répartition de thurifère dans la zone qu’il subit une forte action anthropique qui serait à l’origine de ces formes obtenues et de leurs fréquences.

Concernant le nombre de tiges par arbre, il est très variable, oscille entre 1 et 6 tiges par individu, dont plus de 70 % des arbres recensés présentent plus d’une tige par individu montrant une structure multicaule. Ce caractère morphologique, peut être expliqué par un pâturage des jeunes plantules dont les jeunes semis peuvent perdre leurs bourgeons apicaux après passage d’un troupeau, aussi par la dégradation causé par l’homme après coupe pour le prélèvement du bois et du fourrage qui laisse de nombreuses traces de mutilations.

Photo 3.b : arbre brûlé (la région de Hkoukth).
Photo 3.b : arbre brûlé (la région de Hkoukth).

L’étude de caractéristiques des formations à thurifère de l’Aurès et de leurs comparaisons avec les différents peuplements en pourtour méditerranéen montre que la région de l’Aurès abrite les formations les plus faibles en matière de densité et de surface, révélant ainsi sur un état de dégradation avancé qui dépend probablement de changement climatique et de pression anthropique exercée intensivement et qui remonte dans l’histoire. Ce qui nous amène a penser que cette structure serait artificielle (un acte de défrichement par l’homme et son animal), une hypothèse soutenue par les observations notées dans la zone, dont la forme des arbres (qui marque l’état défrichement), les traces de la céréaliculture, les arbres brûlés, le pacage… (Photo 3.a, b).

Régénération naturelle

Des jeunes plantes ont été observées par Yassine Beghami en 2011 dans la région de Hkoukth ainsi dans celle de Hizi n l’Abadh, cependant et pour maintenir ce patrimoine biologique et historique dans la région, des méthodes de multiplication asexuée peuvent être appliquées.

Conclusion

Le Genévrier thurifère, capable de résisté aux températures extrêmes et qui joue un rôle très particulier et unique ; écologique, socio-économique, floristique, scientifique et culturel dans toute son aire de répartition, constitue un écosystème unique et une richesse patrimoniale et écologique tout à fait majeure, mais particulièrement menacée, aussi vulnérable surtout les formations Algériennes, plus rares. Ces formations peuvent devenir rare à court terme si un plan de conservation et de préservation n’est effectuer au niveau locale et méditerranéen et qui fait intégrer les riverains pour avoir diminué la pression exercer sur le thurifère ; des actions qui sont très nécessaires pour éviter une régression réelle et irréversible et qui conduirait sûrement à la disparition de ces formations.

Abdeldjalil AISSI

Bibliographie :
Temagoult ., 1988. Inventaire et répartition du genévrier thurifére (Juniperus thurifera) dans l’Aurès, Memoire Ing. I.N.E.S Agronomie. BATNA. 61 P.
Beghami Y., KALLA.M. VELA .E., THINON.M., BENMESSAOUD.H., 2013. Le Genévrier thurifère (Juniperus thurifera L.) dans les Aurès, Algérie : considérations générales, cartographie, écologie et groupements végétaux. Ecologia mediterranea – Vol. 39 (1) – 2013.

Bassem ABDI

Passionné d'histoire, j'ai lancé en 2013 Asadlis Amazigh, une bibliothèque numérique dédiée à l'histoire et à la culture amazighe ( www.asadlis-amazigh.com). En 2015, j'ai co-fondé le portail culturel Chaoui, Inumiden.

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