AnthroponymieContributions

Étymologie de l’anthroponyme amazigh « Mennad »

La présente étude tente de saisir l’étymologie ou l’archéologie linguistique d’un nom propre de personne, – on comprend de nos jours par nom propre de personne « le nom appartenant en propre à une personne », cela par opposition au nom commun -. Elle poursuit aussi l’ambition de contribuer aux études des systèmes anthroponymiques amazighes qui demeurent à nos jours l’un des parents pauvres de la recherche en sciences humaines et sociales.
J’aborderai dans le présent papier un anthroponyme qui, ayant au moins fait l’objet d’une interprétation, a stimulé et passionné des chercheurs. Il s’agit du nom propre de personne Mennad dont presque la seule étymologie rapportée est celle du Professeur Kamel Naït-Zerrad qui demeure incertaine. Dans son « Dictionnaire des prénoms berbères, AMAWAL IZARISMEN IMAZIΓEN, EDITIONS ENAG, 2005 », page 97, Kamel Naït-Zerrad donne l’interprétation suivante : « Mennad – masculin – de amennad « celui qui regarde devant soi ; qui est digne de ; homme d’honneur », du verbe mnid. Nom du père de Ziri, fondateur de la dynastie ziride. » Cette interprétation fournie ne satisfait pas l’esprit en présentant une double inconséquence, car, d’un côté, elle prête au contenu sémantique d’un nom celui d’un thème verbal de portée synchronique, et en plus elle ne tient pas en compte les matériaux lexicaux attestés synchroniquement au moins en 2 régions éloignées l’une de l’autre (Grand Sud, Maroc Central). Toutefois, il peut être faire observer qu’il est nécessaire de ne pas négliger l’apport de l’histoire à propos de divers personnages de la période médiévale tout exceptionnellement. Ceci étant donné, on peut constater la continuité de l’anthroponyme – que de l’ethnonyme – Mennad(a) dans le temps aussi bien que dans l’espace et ce, jusqu’à nos jours, avec toute une charge linguistique et culturelle qui soit à sa base.
Cependant, le Professeur Salem CHAKER, en le citant, écrivait dans « manuel de linguistique berbère  – II, Syntaxe et diachronie, ENAG – Editions, 1996 », page 157, ce qui suit: « Prénom porté par divers personnages médiévaux (notamment Bologgin u Ziri u Mennad). Se trouve aussi comme ethnonyme (tribu Mennada)… Ce prénom est encore usité en Kabylie où la seconde nasale médiane est nettement tendue (Mennad), ce qui lui donne une forme caractéristique de prétérit de verbe d’état (« il est… »). A rattacher à une racine *MND non identifiée. »

Si la question de savoir si les locuteurs de la langue amazighe pouvant reconnaître spontanément les noms propres appartenant au fonds culturel de leur langue, peut être posée, du point de vue théorique, la question change d’orientation, car elle ne porte pas sur des entités linguistiques concrètes, mais sur le mode de formation et du concept lui-même de la classe nom propre. Bien que les noms de personnes, considérés comme une sous-catégorie des noms propres ayant pour fonction de désigner, identifier, singulariser, appeler, interpeller et individualiser l’être humain, peuvent échapper à l’évolution permanente, les mots de la même famille lexicale d’une langue en contractant des relations, constituent une grille morphosyntaxique et cela, même si leurs notions sémantiques et morphologiques relationnelles puissent évoluer et se modifier en fonction de la dynamique évolutionnaire et des besoins d’usage des communautés linguistiques en question. Et là le nom propre Mennad, susceptible d’être analysé à plusieurs niveaux et se manifestant en tant qu’un apprentissage conventionnel et social aussi bien que mémoriel, n’en fait pas l’exception. Comment expliquer le contenu du nom propre de personne Mennad ? C’est la question à laquelle je tenterai de répondre en partant et m’appuyant sur les matériaux lexicaux auxquels je suis parvenu, et sur des observations réelles censées offrir une piste d’analyse afin d’en tirer une conclusion sur l’étymologie de l’anthroponyme Mennad.

La question de l’étymologie du mot mennad est à poser d’une manière profonde et méthodiquement en se rapportant théoriquement à la suite des consonnes /mnd/. Pour considérer ladite suite de consonnes, on est appelé préalablement à supposer les 4 pistes étymologiques suivantes :

1- Le nom propre Mennad peut être issu d’une racine trilitère de forme [MND].
2- Le nom propre Mennad, dérivé en m-, peut être issu d’une racine bilitère de forme [ND].
3- Le nom propre Mennad, dérivé en mn-, peut être issu d’une racine monolitère de forme [D].
4- Le nom propre Mennad peut être issu d’une racine diachronique (?) ayant été à la base de sa formation.
C’est en explorant et traitant les matériaux lexicaux de l’ensemble amazighe et en me basant sur les différentes correspondances morphosémantiques que je suis conduit dans la logique des manifestations lexicales à m’orienter vers la 4ème piste. Comme nous allons le constater infra, un faisceau de données lexicologiques convergentes ne peut que favoriser la 4ème piste.
Attestée en langue amazighe (en variantes amazighes, selon un autre terme), la suite de consonnes /nbḍ/, qui se manifeste en Tamahaq sous forme de /nhḍ/, renvoie à des notions sémantiques telles « commander, ordonner, décider, exercer le pouvoir, exercer l’autorité, régner, conseiller ». Ceci étant donné, je fais remarquer que le même nom que Mennad (avec une dentale emphatique) est usité chez les Imazighen du Niger (Tawellemment de l’Azawagh et Tayert), cela sous le contenant amennaḍ (pl. imennaḍen) qui véhicule les sens de « homme qui décide, chef-décideur, décideur (homme) ». Toujours dans ces 2 derniers parlers touaregs, on relève le nom féminin tanaḍt (pl. tinaḍin) véhiculant les sens de « autorité, pouvoir, décision, ordre, conseil ». Tamahaq de l’Aheggar atteste de sa part l’autre variante nominale amenneheḍ (1) qui veut dire « homme décideur (au sens habituel), homme ayant le pouvoir de décider ». Son féminin correspondant est tamenneheḍt (pl. timenneheḍin). En restant dans l’aire de Tamahaq de l’Aheggar, le verbe neheḍ renvoie au sens de « ordonner, commander, décider et, par extension, avoir le pouvoir de prendre des décisions » et tanaḍt (pl. tinaḍin) « décision et, par extension, ordre, manière de voir, sentence, pouvoir de prendre des décisions ». Ceci étant donné, je fais observer que c’est à partir du verbe nheḍ/nbeḍ que toute une famille lexicale s’organise. Dans cet enchaînement d’idées, c’est le verbe nbeḍ/nheḍ qui doit revêtir la signification « décider, exercer le pouvoir, l’autorité » et qui, par le biais de ses dérivés, a engendré une série de mots (2). Les variantes ayant développé davantage l’exploitation de la racine en question est vraisemblablement celles des Imuhaq (Touaregs de l’Aheggar) et du Maroc Central. Par ailleurs, je pense que l’une des variantes amazighes du nord ayant conservé un mot issu de la même racine est celle du Maroc Central. Cette dernière, en clarifiant davantage la situation traitée ici, fait usage de la variante phonétique verbale nbeḍ « exercer l’autorité, exercer et avoir le pouvoir de, commander… », du nom anebḍu « arbitre, juge, celui qui départage… », des substantifs anebbaḍ (pl. inabbaḍen) « chef d’autorité qui agit avec sagesse… » et baḍ « pouvoir, être capable de ; avoir autorité sur, avoir pouvoir sur ».
Sans aller au fond des questions ayant trait aux choses historiques, bien que l’histoire ne livre que quelques renseignements fragmentaires sur la vie de Mennad (3) Uw Menkouch (père de Ziri, le fondateur de la dynastie At Ziri (les Zirides) faisant partie de la grande famille Ẓennag (les Sanhadja des auteurs d’expression arabe), il y a lieu de constater que Mennad Uw Menkouch (ou Menkous, selon certaines sources) Uw Ẓennag Amezyan (Sanhadja le jeune) aurait exercé au 10ème siècle de l’ère chrétienne une large autorité au sein de sa dominante et puissante tribu Telkat (4), ce qui n’exclut pas que son nom Mennad puisse tirer son origine étymologique de cette même autorité et pouvoir détenus sur sa tribu que sur une partie nord-africaine et ce, au nom du califat abbasside et, à un degré moindre, en tenant son autorité des Aghlabides. Autrement dit, le nom propre de Mennad (Uw Menkuc/Fils de Menkouch) aurait pu plausiblement tirer sa signification de l’autorité exercée par le porteur de ce même titre et de son statut social que politique, sans que cette situation ne s’élève à un statut politico-administratif largement indépendant tel celui d’un Agellid et d’un Amnukal (pour le cas des Imuhaq). Dans cette hypothèse émise, on peut s’interroger si ce chef avait-il porté tout d’abord à sa naissance un autre nom que celui de Mennad ? Historiquement, en détenant un pouvoir continu, Mennad, l’un des princes amazighs les plus puissants, les plus influents de son temps, eut à passer une bonne partie de sa vie à soutenir des guerres contre ses adversaires voisins, les Meghrawa de la branche Zénète sur lesquels obtint l’ascendant.
Pour revenir au contenant de la lexie mennad dont le schème est de type (a)C1C2C2aC3, je dirais qu’il présente relativement une certaine stabilité et une quasi-homogénéité à travers les matériaux lexicaux attestés et examinés. Les formes dérivées toutes en un 2ème temps en m- (5) :mennad, amennaḍ et amenneheḍ sont aisément justifiées par une alternance phonologique se traduisant par la substitution du phonème /d/ à celui de /ḍ/ (2 phonèmes voisins), une substitution irrégulière présente en diverses variantes amazighes. Dans cette optique d’idées, si je néglige la consonne radicale /h/ de la suite de consonnes synchronique /mnhḍ/ (on devrait aussi penser à l’autre substitution /b/ : *(a)menbad (6) > (a)mennaḍ (assimilation de /b/ en /n/ : /nb/ > /nn/) > (a)mennad)) (7), j’aurais à faire observer que la relative stabilité du nom (a)mennad est remarquable, sachant que le matériau historique mennad en tant que charge historique, linguistique et en tant que noyau solide de la langue, justifie largement cette même stabilité que sa parenté lexicale. Sans risque de m’induire en erreur, je puis confirmer que la forme anthroponymique Mennad a su se conserver jusqu’à nos jours et cela, depuis au moins la période médiévale.
Les variantes amazighes relevant formellement et fonctionnellement d’une profonde, directe et même identité linguistique, conduisent à conclure que le noyau résistant du lexique est appelé à permettre, grâce à l’appui des interprétations diachroniques basées surtout sur la synchronie de l’ensemble en question avec sa gigantesque somme linguistique, d’avoir les réponses des questions dont la confection d’un dictionnaire étymologique des racines amazighes dépendra énormément de la fiabilité, de l’exactitude de ces mêmes réponses et du degré de probabilité des hypothèses étymologiques émises.
Dans cette lecture descriptive, le cas de la forme anthroponymique Mennad qui remonte bien entendu dans le temps, reflète à lui seul une instabilité certaine et ancienne en ce qui concerne l’opposition phonétique « ḍ/d ». En outre, la structure de la suite de consonnes /mnbḍ/ suite à la perte de la labiale /b/ (ou ayant vu cette même labiale supplantée par la laryngale fricative /h/, pour le cas de Tamahaq de l’Aheggar), traduit une situation (très ancienne ?) où des mots tels amenneheḍ, amennaḍ et (a)mennad avaient fini par être isolés les uns des autres. Devant cette assimilation et fusion de consonnes consécutives de localisation voisine (« nb/nn ») rendues par la réalisation tendue de la 1ère consonne du groupe en question (/nn/), et suite à l’évolution de l’emphatique dentale en dentale non emphatique (/ḍ/ > /d/), l’entrainement d’une faille et d’un délabrement phonétique dans le système de la famille lexicale issue d’une même racine, avait eu lieu. Là il y a à faire remarquer que l’analyse de la situation diachronique de l’Amazighe révèle toute une tendance à la rupture des liaisons signifiantes (que signifiées) entre les variantes, voire les parlers d’une même variante.
Bien que le principe de naissance du lexique amazighe obéit au modèle : racine + schème = thème, amennad, un nom d’agent, est justifié par la forme amazighe fondamentale m-CCaC dans laquelle l’intervention du préfixe dérivationnel m- « celui qui affecte l’action x » permet l’obtention d’un déverbatif (amennad < *nned) ; et le thème (supposé déjà verbal) nned marqué en réalité par une double évolution phonétique, se trouve ainsi isolé de tout point de vue dans l’ensemble lexical amazighe. Ce n’est qu’en confrontant et analysant les divers matériaux lexicaux attestés à l’état synchronique que l’on peut arriver à rassembler les pièces du puzzle grâce au verbe nbeḍ (attesté au Maroc Central) qui soit diachroniquement antérieur : *nned < *nbed < nbeḍ. Il me parait que le Touareg représente un cas relativement isolé : naḍu (parlers du Niger) < neheḍ (Tamahaq de l’Aheggar) < *nebeḍ. Sur ce terrain, le parler touareg de l’Aheggar (plus que ceux du Niger) diverge davantage des variantes du Nord illustrées par le nom anebbaḍ attesté au Maroc Central. Ceci étant explicité, on a atteint ici une forme essentielle du lexique, par laquelle elle se distingue des autres unités lexicales.
Pour clarifier davantage la situation propre au nom de personne Mennad apparenté génétiquement à un thème verbal, il y a à faire observer que cet anthroponyme (Mennad < m « morphème de dérivation » + *nned (< *nbed < nbeḍ) « décider, exercer le pouvoir, détenir l’autorité ») ne constitue rien d’autre qu’un nom propre qui soit le même nom que l’on retrouve de nos jours par ailleurs et au demeurant en Touareg de Tawellemment de l’Azawagh et de Tayert (Niger) sous la forme amennaḍ et au Maroc Central sous l’autre forme phonétique anebbaḍ qui aurait bien pu théoriquement donner naissance à un dérivé en m- tel *amnebbaḍ. Cela parait-il n’est pas le cas, du moins à l’état synchronique. J’ignore si l’on peut relever le dérivé (en mn-) *amnebbaḍ quelque part dans l’ensemble amazigh. Le lien entre ces variantes phonétiques amazighes est bien réel, et leur intégration dans un processus de dérivation ainsi que leur unité morphologique dont l’évolution est attestée dans l’ensemble amazigh, sont sans aucun doute révélatrices d’une même et profonde parenté lexicale.
Pour conclure, la lecture sémantique à donner à l’anthroponyme Mennad est celle qui le rattache principalement au sens de « décideur (homme, chef), homme détenteur de pouvoir et d’autorité », attesté du reste jusqu’à nos jours. Outre les constats historiques, il y a cependant beaucoup plus d’éléments et de matériaux lexicaux concordants en faveur de cette lecture plutôt que de celle qui voit en lui le sens de « celui qui regarde devant soi, qui est digne de ; homme d’honneur ». Ceci étant donné, le nom propre Mennad, à l’appui de sa forme sémantique, tire son origine et porte les marques d’une institution sociale telle que le pays est fondé sur des conventions et des représentations sociales véhiculées par des pratiques et des fonctions exercées.
Outre l’idée d’avoir eu accès à l’esprit d’un anthroponyme qui datait au moins de la période médiévale, autrement dit de l’époque du prince Mennad Uw Menkouch, je note que le nom (a)mennad se manifeste et entre aussi dans la formation d’ethnonymes, de patronymes et de noms géographiques dont il peut être évoqué Ayt Mennad (tribu de l’Atlas mitidjien, près d’El Hajjout), Beni Mennad, Mennad, Takatyun Uwt Mennad Uw Tbadlet (de la tribu des Meghrawa) ainsi que le mont Mennada (8). Par ailleurs, Brahim Uw Mennad (Ben Mennad, selon les auteurs d’expression arabe), fut le nom que portait un pieux personnage historique du Mzab (avec /z/ emphatique) ayant vécu au 10ème siècle de l’ère chrétienne.
L’histoire de la période médiévale n’a cessé de citer des personnages dont les noms comportent l’anthroponyme Mennad, je cite à titre d’exemple Al-ɛabbas ben Mennad ben Al-ɛabbas (12ème siècle), prince des At Waggin (Beni Tudjin, des auteurs d’expression arabe), Ɛaṭia ben Mennad ben Al-ɛabbas ben Dafelten, dit Ɛaṭia Al-Ḥeyyou et le prince Mennad ben Ɛabdallah. La répercussion dans la bibliographie médiévale et la conscience de la distribution (ancienne et contemporaine) du nom personnel Mennad (9) dans des régions différentes expliquent son enracinement dans la pratique onomastique amazighe qui remonte dans le temps. On peut aussi voir en la forme anthroponymique Mennad le reflet de la dynamique diachronique – d’un stade évolutionnaire – de la langue amazighe de la période médiévale qui, depuis un stade antérieur inconnu, avait su maintenir un nom propre de souche amazighe en l’adaptant bien à un comportement phonologique tel que décrit supra. Et c’est justement cette phonologie qui avait permis de se fixer et sous laquelle le nom propre de personne Mennad est arrivé jusqu’à nos jours.
En arrivant au terme de ce papier, les reflets dans l’ancienne anthroponymie du nom Mennad présentent une richesse et une variété à travers les variantes actuelles de l’ensemble linguistique amazighe, qui de leur côté sont appelées à clarifier aussi les questions étymologiques telles celles liées à la racine lexicale [BḌ] fournissant des mots apparemment différents, mais entre lesquels la parenté et l’unité morphosyntaxique sont manifestement profondes. Parlant de ces traits communs à ces occurrences, il ne s’agit pas d’un cas isolé de la langue, mais d’un panorama qui souligne l’importance de la prise en charge des variantes attestées dans une meilleure appréhension et maîtrise des situations lexicologiques.

Hammou DABOUZ

Note :

(1) Le couple dental d/ḍ connait une large alternance en Amazighe. S’agit-il d’une économie d’effort à l’échelle des organes phonateurs qui, pourtant, n’est pas systématique ?
(2) Outre les formes primaires, les dérivés avec lesquels se manifestent tous ces mots sont en:
• m-
• n-
• mn-
• s-
• sn-
Des dizaines de mots renfermant des sens en rapport avec les notions fondamentales de « séparation, division, partage », peuvent être relevés en l’ensemble linguistique amazighe. L’intervalle sémantique de cette famille lexicale reste ouvert. Là-dessus, une lexie comme beṭṭu que l’on a eu du mal à expliquer, doit renvoyer aux sens de « partage, division ; divorce ». Il s’agit à ce propos d’une forme particulière attestée aussi bien en diverses régions (Libye, Tunisie, Algérie, Maroc, Grand Sahara…).
(3) Selon les auteurs du Moyen âge tels Ibn Kheldoun, Mennad, ancêtre des At Ziri (Zirides) renommé d’une grande force physique et d’une générosité qu’hospitalité, fut au 10ème siècle de l’ère chrétienne un chef des Imazighen Sanhadja. Les Sanhadja occupaient spatialement un territoire assez vaste, limité comme suit :
– Au Nord : La mer méditerranéenne qui longe les espaces depuis Mostaghanem jusqu’aux parages de Béjaïa.
– Au Sud : La ligne partant de M’sila pour arriver à Boghar.
– A l’Est : La ligne irrégulière allant de Béjaïa dans le Nord pour se prolonger à la ville de M’Sila.
– A l’ouest : Le Parcours de l’oued Chlef. Pourtant certaines sources écrites confirment que le chef Mennad résidait dans une forteresse sise proche de la ville (Zénète) de Sidijlmassa.
(4) Selon A. Ibn Khedoun, les descendants de Telkat (Telkata, forme arabisée) sont rencontrés dans deux 2 provinces (Béjaïa et Tunis).
(5) Le morphème dérivationnel m-, dans ce cas, sert à former les noms d’agent.
(6) Je mets un astérisque devant un mot pour marquer que ce n’est pas attesté à l’état synchronique, du moins à ma connaissance.
(7) Je fais là abstraction du phonème /h/ employé par les locuteurs de Tamahaq et qui soit en rapport historique avec le phonème /b/ (> /h/) attesté dans la variante du Maroc Central anebbaḍ. Et, eu égard des études diachroniques, l’absence de /b/ (ou /h/ ?) dans la variante mennad n’est guerre gênante. La variante phonétique dont le morphème /b/ est absent, peut aisément être vue comme étant le témoin d’une situation diachronique reconnaissable en langue amazighe. Par ailleurs, j’irais jusqu’à faire observer que la racine diachroniquement antérieure est la bilitère [BḌ] qui fournit entre autres mots le verbe primaire bḍu « partager, diviser, séparer, distribuer, départager ; rendre jugement, divorcer… ». Dans cette hypothèse, la situation diachronique des suites de consonnes /nbḍ/ (< *mnbḍ) s’analyse comme suit : /nbḍ/ > /nhḍ/ > /nḍ/ > /nd/, d’où *amenbaḍ > amenneheḍ > amennaḍ > (a)mennad, en admettant une dérivation en mn- qui soit le vestige d’un processus dérivationnel ayant par ailleurs produit d’anciens noms – je dirais aussi titres – tels dans le cas de amnukal (< mn « morphème de dérivation » + akal « pays, terre… »). Le nom amnukal est chez les Touaregs un titre porté par leurs chefs suprêmes et remplaçant Agellid/Ağellid de l’Amazighe du Nord. Dans cette optique d’idées, on peut en outre songer à l’épigraphe consonantique de Dougga MNKD, un antique titre dérivé en mn- que je ramène à amenkad. Sans avoir l’ambition de chercher à tenter de combler toutes les lacunes entourant le présent sujet, je me suis limité à l’aspect anthroponymique tout en restant attentif aux dimensions et données connexes jugées pertinentes.
(8) Il y a lieu de voir en la forme arabisée Mennada la corruption de Mennad. Le /a/ final est le suffixe du féminin en langue arabe.
(9) Cependant, les documents de la période médiévale n’attestent pas l’existence de la forme tamennadt « décideuse » traduisant le genre féminin.

Références bibliographiques consultées :
– IBN KHELDOUN, HISTOIRE DES BERBERES ET DES DYNASTIES MUSULMANES DE L’AFRIQUE SEPTENTRIONALE, TRADUCTION DE WILLIAM MAC-GUCKIN DE SLANE, Volume 1, Editions BERTI, Alger, 2001.
– Kamel Naït-Zerrad, DICTIONNAIRE Des Prénoms Berbères, AMAWAL IZARISMEN IMAZIΓEN, EDITIOSN ENAG, 2005.
– Kamal NAÏT-ZERRAD, DICTIONNAIRE DES RACINES BERBERES (formes attestées), Volume I, A – BΣẒL, Editions PEETERS, Paris – Louvain, 1998.
– Mohand Akli HADDADOU, DICTIONNAIRE DES RACINES BERBERES COMMUNES, Suivi d’un index français-berbère des termes relevés, Haut Commissariat à l’Amazighité, 2006/2007.
– Salem CHAKER, MANUEL DE LINGUISTIQUE BERBERE – II Syntaxe et diachronie, ENAG – Editions, 1996.

Références bibliographiques consultées (d’expression arabe):

– ابن أبي زرع الفاسي (…-1326 م)، الأنيس المطرب بروض القرطاس في أخبار ملوك المغرب و تاريخ مدينة فاس، صور للطباعة و الوراقة، الرباط 1972.
– عبد الرحمان بن خلدون (1332-1406 م)، تاريخ ابن خلدون المسمى ديوان المبتدأ والخبر في تاريخ العرب والبربر ومن عاصرهم من ذوي الشأن الأكبر، مراجعة الدكتور سهيا زكار، الأجزاء من 1 إلى 7، دار الفكر للطباعة و النشر، 2000.
– حمادي الساحلي (نقله إلى العربية)، الدولة الصنهاجية، تاريخ إفريقية في عهد بني زيري من القرن 10 إلى القرن 12 م، الجزء الأول و الجزء الثاني، دار الغرب الإسلامي، الطبعة الأولى 1992.

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